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Le 2 juillet 1937, quand elle décolle de Lae (Papouasie Nouvelle Guinée) il ne lui reste que 3 étapes pour finir son tour du monde, Lae/Howland 4 113 km, Howland/Hawai 3 100 km, Hawai/Oakland 3 800km. Cependant il s'agit en fait de la traversée de tout le l'océan Pacifique Sud et ces 3 étapes sont d'un bout à l'autre au dessus de l'océan. La première étant la plus longue et la plus difficile, car il faut trouver l'île de Howland, une île basse et minuscule, au ras de l'eau, qui n'est donc visible que de très près, et qui est donc quasiment impossible à trouver avec les moyens de navigation de l'époque.

On prépare la traversée du Pacifique avec sérieux !

Amelia Earhart et son navigateur Fred Noonan avant le départ... Fred Noonan pointe son doigt, en riant, sur l'île du Pacifique qu'ils ne trouveront jamais...

L'île de Howland, île américaine, devait servir de relais pour refaire le plein carburant. Pour la ravitailler et l’aider à la navigation finale l’USCGC Itaska, bateau garde-côtes de la Marine Américaine, l’attendait sur place, à côté de l’île. Il naviguait autour car il n’y a sur cette île minuscule ni port, ni lagon. C'est un récif plat, qui "culmine" à 3m d'altitude, sur lequel une piste de secours avait été aménagée.

L'USCGC Itaska cédé aux anglais pendant la guerre et rebaptisé HMS Gorleston

l'opérateur radio de l'Itaska

Cependant, au décollage sur la mauvaise piste de Lae, elle avait arraché son antenne ventrale : elle pouvait émettre mais elle n'avait plus de réception, et elle ne s'en était pas rendu compte... elle s’étonnait donc de ne pas avoir de contact radio. Et, sans avoir de réception, elle ne pouvait plus se faire guider par l'Itaska.

Image du site Tighar: https://tighar.org/Projects/Earhart/AEdescr1.html  

Au lever du jour son navigateur, Fred Noonan, n'avait plus les étoiles pour naviguer mais il a pu refaire un point sur le soleil qui leur permettait de rejoindre l’axe Nord / Sud passant par l’île de Howland, mais sans savoir de quel côté de l’île ils se trouvaient. « We are on the line 157 337 WL », mais ils ne savaient pas s'ils étaient au Nord ou au Sud de l'objectif ! L’ambiance dans l’Electra devait être un peu « électrique ».

 

Fred était à l’arrière, derrière le bloc de réservoirs supplémentaires. A cause de cet éloignement et du bruit des moteurs, ils ne se parlaient qu’en se passant des messages au bout d’une tige en bambou. (*)

(*) https://tighar.org/Projects/Earhart/Archives/Documents/Luke_Field.html item n°38.

Comme elle l'a signalé, ses réserves en carburant diminuaient. Amelia a choisi de partir vers le Sud car il n’y avait aucune île au Nord de Howland (rien avant Midway à 3 000km au Nord). Au cas où elle serait déjà trop au Nord c'était trop dangereux de continuer dans cette direction. En partant vers le Sud elle pouvait soit trouver Howland, soit Baker, soit une île plus au Sud. Et elle s'est mise à voler bas, sous la couverture nuageuse, pour tenter de trouver un endroit pour atterrir. Ce faisant l'Itaska ne pouvait plus la capter.

Remarque : Amelia était sans doute assez tendue. A Lae elle était restée alitée avec une forte dysenterie, allant jusqu'à retarder son départ alors que l'Itaska, et ses 97 hommes d’équipage (*), l'attendait en tournant autour de l'île de Howland, car cet îlot minuscule ne possède ni port, ni une baie où l'on puisse s'amarrer. Alors qu'il s'agissait de l'étape la plus délicate, elle est partie en mauvaise forme physique et dans une mauvaise fenêtre météo, tout au moins en ce qui concerne la visibilité. Après une vingtaine d'heures dans le bruit des moteurs, avec un problème de communication très stressant, elle a sans doute manqué de lucidité. Elle n’avait aucune chance de trouver Howland sans le guidage final de l'Itaska. Il aurait fallu qu'elle dise clairement : "depuis le départ je n'ai aucune réception, sans doute une panne, si vous m’entendez je prends le cap Sud, et je descends à basse altitude pour chercher un endroit pour atterrir, cherchez moi sur cet axe".

(*) 97 hommes en 1940, ensuite, pendant la guerre, toute cette classe de gardes côtes ont été cédés aux anglais et l’un d’entre eux est torpillé par un U boat allemand, le total des morts et des survivants est de 130 mais, en temps de guerre, et avec un armement plus complet, le nombre des membres d’équipage est un peu plus élévé.

Sur cette zone, il n'y a que des atolls qu'on ne peut pas apercevoir de loin comme les îles hautes. Finalement elle a sans doute aperçu l'épave du Norwich City, puis l’île basse sur lequel il était échoué. Le Norwich City s’était échoué en novembre 1929 sur l’île Gardner, un petit atoll renommé ensuite du nom polynésien de Nikumaroro. A noter que cette île est en plein sur l’axe Nord / Sud, (plus exactement l'axe 157 / 337), sur lequel ils s’étaient positionnés.

Amelia choisit de se poser sur le platier non loin de l'épave du Norwich City, mais elle arrache son train d'atterrissage, tout au moins du côté droit.

Remarque : Amelia est arrivée autour de 10h30, en début de marée montante, et elle espérait pouvoir se poser sur le platier rocheux qui semblait assez plat. Sans doute pensait-elle, en fin d’atterrissage, remettre un peu les gaz pour rapprocher son avion de la plage. Elle comptait trouver du secours et peut-être du carburant pour redécoller. Ou bien elle pensait pouvoir joindre l'Itaska qui pourrait venir depuis Howland pour la ravitailler. Elle voulait finir son Tour du Monde et elle ne pouvait pas prévoir que son train droit allait se coincer dans une faille, rendant son avion totalement inutilisable, et à un endroit où il serait à moitié immergé à marée haute. Si elle était arrivée à marée haute elle aurait sans doute choisi d'amerrir dans le lagon en s'arrangeant pour finir près d'une plage ou dans un endroit peu profond. Et finalement sa situation aurait été bien meilleure.

L'avion penchait du côté droit mais le moteur intact de l'aile gauche pouvait encore tourner et assurer l'alimentation électrique de la radio. Pendant quatre jours, à marée basse, Amelia a émis des messages de détresse. Puis l'avion a été emporté par une marée plus forte.

Pendant ces 4 jours le coefficient de marée a doublé, passant de -40 +40, soit 80cm, à -85 +85, soit 170cm d'amplitude totale.

Les horaires et les coefficients de marée du 2 au 9 janvier 1937 sont donnés sur le site de Tighar (une vraie "mine d'or"), avec le niveau d'eau par rapport à l'avion : marées à Nikumaroro

 

Vendredi 2 juillet 1937

Ils atterrissent en début de marée montante, à environ 10h du matin. Les journées sont courtes, la position géographique de Nikumaroro (*) est presque sur la ligne équatoriale, à 560km au Sud.

(*) le Lookeed Electra d’Amelia est à Nikumaroro, soit à 680km au Sud de l’île de Howland où l’attend l’Itaska qui ne peut plus l’entendre à cause de la courbure terrestre.

L’atoll est entouré d’un platier rocheux assez large, recouvert à marée haute, qui descend en pente douce vers l’océan.

Amelia choisit d’atterrir sur le platier car elle espère pouvoir redécoller : elle imagine qu'elle va trouver du carburant sur place, ou qu'on viendra la ravitailler (*). Elle a presque fini son Tour du Monde. Elle ne peut pas penser à un accident. Avec du recul il aurait été plus avisé d’amerrir dans le lagon, à un endroit de faible profondeur, mais dans ce cas il lui aurait fallu accepter d'endommager son avion, ce qui n'est pas envisageable pour elle.

(*) Un peu de carburant et quelques renseignements précis sur sa position, et elle pouvait redécoller pour rejoindre l’île Howland...

En début d’atterrissage, à vitesse élevée, la roue droite se bloque dans une faille, d’où un choc très sévère, et l’avion pivote violemment autour de son train droit. A l’avant Amelia est attachée par une ceinture, mais l’empennage de la queue de l’avion a tourné violemment et un palonnier est remonté brusquement en forçant sur son pied : sa cheville est foulée. Noonan, à l’arrière, non attaché, a été projeté et sa tête a heurté la carlingue, et il se retrouve avec une forte commotion cérébrale.

Ils sont sortis de l’avion et Amelia a trouvé un endroit proche de la plage pour installer Noonan. La journée n’est pas très chaude à cause de la couverture nuageuse.

Ensuite elle part sur l’île pour chercher du secours. Elle passe à côté de l’épave du Nordwich City, mais la coque est très rouillée et le nom du bateau n’est plus vraiment lisible. Il lui semble voir New York City. (*)

(*) D'après la photo prise quelques mois plus tard (octobre 1937) lors d'une reconnaissance des anglais qui voulaient recoloniser cette île, il semble que le nom du bateau ne soit plus apparent sur la coque de l'épave. Cependant, à proximité, il y a les « sépultures » de 3 marins du Norwich City, ensevelis sommairement près de la plage, avec peut-être une croix et une inscription où figure peut-être le nom du bateau, plus ou moins lisible ou peut-être écrit en abrégé (?). En tous les cas Amelia a lu quelque chose soit sur la coque, soit plus probablement sur une inscription funéraire.

Le SS Norwich City s'est échoué 8 ans plus tôt, en pleine tempête, et un incendie a ravagé le bateau obligeant l'équipage à l'abandonner en pleine nuit. Cet incendie a chauffé ou brûlé les peintures ce qui a  sans doute accéléré la corrosion du bateau, et 8 ans après on ne voit plus d'inscription sur sa coque. Ce cargo transporteur de charbon, était à vide, mais ses turbines à vapeur fonctionnaient au fioul, et il y avait donc une bonne quantité de carburant dans le bateau.

L’évacuation du bateau s’est mal passée, le canot de sauvetage s’est retourné et tout le monde s’est retrouvé dans l’eau. Parmi les 11 hommes qui sont morts noyés ou dévorés par les requins, seulement 3 corps ont été repêchés et enterrés sur la plage.

Les survivants ont été récupérés quelques jours après par un autre navire, ils sont donc restés très peu de temps sur l’île, dans un campement de fortune, ils n’avaient ni le temps ni les moyens de faire de vrais tombes pour leurs camarades.

Amelia s’est fait un petit bandage à la cheville et a trouvé une sorte de canne. Peut-être a-t-elle d’un côté une de ses chaussures de femme, et de l’autre (du côté du pied bandé) une chaussure d’homme plus grande, empruntée à Noonan. (à côté du squelette retrouvé en 1940 il y a une chaussure de femme et une chaussure d'homme). C’est une jeune femme mince et sa foulure ne l’empêche pas de marcher sur du sable et sur une île horizontale. Mais cela va certainement limiter ses recherches d’eau potable là où la végétation est plus dense.

Elle fait un grand tour sur l’île et se rend vite compte qu’elle est inhabitée et qu’ils sont seuls et donc sans secours. Et elle est inquiète car Noonan est dans un état grave et elle-même comptait être à Honolulu en moins de 48h et pouvoir finir de soigner sa dysenterie dans un bon hôpital.

En fin d’après-midi, à marée basse, ils regagnent l’avion qui n’a pas bougé (les coefficients de marée ne sont pas élevés, la marée haute n’était que de +40 et Amélia allume le moteur gauche pour charger les batteries et utiliser la radio. Elle passe des messages pendant plusieurs heures.

 

Samedi 3 juillet 1937

Au lever du jour le samedi 3 juillet, la marée basse est à 9h et Amelia se dépêche d’amarrer son avion au platier. Elle a un bout de corde, des cordelettes, du fil de laiton et quelques outils, (tournevis, clés...) Peut-être parvient-elle à récupérer un des câbles de commande. Très probablement elle plante à la verticale le train droit arraché, dans une faille du platier, la roue vers le haut, pour faire un point d'ancrage. (Ce train restera planté dans le platier après que la mer ait emporté l'avion).

la roue de l'Electra apparait sur une photo de l'officier anglais Eric Bevington (prise le 15 octobre 1937)

Ils ont encore de l’eau potable et quelques provisions.

Le temps est très pluvieux et donc elle retourne dans l’avion et continue d’envoyer des messages de 9h à 12h.

Betty Klenck entend tout depuis la Floride ! Elle est hors de portée de la fréquence radio mais elle capte les « harmoniques » comme quelques autres personnes qui ont pu entendre les messages d'Amelia de très loin.

https://tighar.org/Projects/Earhart/Archives/Research/ResearchPapers/Brandenburg/HarmonyandPower.pdf

Betty note les messages d’Amelia et tout ce qu’elle comprend de la situation. Pour Betty avec 6h de décalage horaire c’est de 15h à 18h. A noter qu’à 17h son père la rejoint et écoute avec elle. Il fera d'ailleurs un signalement aux gardes-côtes. A noter que Betty Klenck, très émue d'avoir entendu les appels de détresse d'Amelia, va garder précieusement son carnet de notes tout au long de sa vie, cela indique bien que ce n'est pas un délire de jeune adolescente...

A noter qu’elle est interviewée par Rick Gillepsie en 2007, que son carnet est photographié, et que l’équipe de Tighar vérifie sur place que le matériel radio dont elle disposait à l’époque pouvait effectivement capter les messages d’Amelia.

Amelia est un peu paniquée. Elle répète le non de l’épave « New York City, New York City », « ou quelque chose comme ça », ajoute-t-elle. Betty entend parfaitement ce que dit Amélie et elle comprend tout ce qui se passe dans l’avion, et elle le note sur son carnet. Son témoignage est prodigieux !

Fred a un hématome intracrânien et il délire. Le temps s’améliore et il y a quelques éclaircies. L’avion commence à chauffer et Fred étouffe. Il se dispute avec Amelia et il tente de prendre le micro de force (*), puis il s’enfuit de l’avion. Amelia éteint le moteur et la radio et le poursuit.

(*) Fred Noonan a une commotion cérébrale qui est signalée à différentes dates dans les messages d’Amelia. Les effets d’une commotion cérébrale bénigne sont limités à une durée d’environ 6 heures. Là il s’agit d’une commotion plus sévère, qui se traduit par des troubles psychiatriques et comportementaux : dépression, anxiété, agitation, impulsivité, manque de motivation, sautes d'humeur... et de problèmes divers : maux de têtes, vomissements, crises convulsives, troubles du langage, de la vision, du sommeil, de la fonction intellectuelle, du mouvement, perte de l’odorat…etc.

Remarque : Le carnet de Betty n'est pas daté, cependant je situe son témoignage au samedi 3 juillet 1937 pour plusieurs raisons :

- Amelia et Fred sont en panique suite à l'accident et à la découverte qu'ils sont sur une île déserte, et donc sans secours.

- Fred a un hématome intra-crânien, il est incontrôlable mais il sera sans doute plus calme les jours suivants,

- Amelia ne parle pas du manque d'eau, alors qu'elle le signale dans les messages ultérieurs,

- Amelia ne signale pas ce jour là qu'elle est sur une île "uncharted" (qui ne figure pas sur les cartes marines), mais, les jours suivants, le ciel se dégage et, de nuit, Noonan a sans doute pu recalculer plus précisément leur position et, dès lors, elle signalera que l’île ne figure pas sur les cartes,

- La marée monte mais le moteur gauche peut tourner car le coefficient de marée est encore bas, à 12h on a dépassé le point milieu de la marée montante, la marée va monter jusqu'à 14h30.

La matinée n’est pas très chaude et entrecoupée d’averses. Le soir ils regagnent l’avion et aussitôt Amelia recommence à passer des messages. Elle ne parle plus du nom de l’épave du cargo échoué, car elle a revu de plus près les lettres inscrites sur la coque (ou sur les tombes des marins) et elle a compris que ce n’était pas New York City. Elle se contente de dire que l’avion est à moitié immergé, à côté d’une épave, et qu’ils sont sur une petite île déserte, non signalée sur les cartes marines, (tout au moins sur les cartes ordinaires), et que son navigateur Fred Noonan est dans un état grave et qu’il a besoin de soins urgents.

Le ciel est plus dégagé et Fred Noonan, peut recalculer leur position avec les étoiles, et il ne voit sur la carte aucune île à cet endroit. Donc il comprend que cette île n'est pas signalée sur les cartes marines et il lui semble important de le transmettre à la radio.

Remarque : Amelia est entendue depuis des bateaux, depuis des avions, depuis d'autres îles ou continents. De nombreux opérateurs radio notent une activité et différents bruits sur la fréquence qu'elle est seule à utiliser. Mais de temps en temps sa voix est entendue et même si on n'a pas les 2 ou 3 heures d'écoute de Betty, il est noté qu'elle est sur une île déserte, non cartographiée, que son avion est à moitié immergé, près d'une épave de bateau, et que Noonan est grièvement blessé. Cette concordance des messages avec le récit de Betty Klenck (qui n'a jamais été diffusé à l'époque), constitue une preuve évidente sur le fait qu'elle a atterri sur une île déserte, qu’elle est toujours en vie, et que son avion est dans l'eau; au moins à marée haute…

Parmi les opérateurs radio qui l’entendent certains relèvent la direction du signal, et ces relevés, faits à des endroits très différents, convergent tous assez précisément vers Nikumaroro.

https://tighar.org/Publications/TTracks/2009Vol_25/postloss.pdf

La nuit dans l’avion se passe bien, l’amarrage fonctionne et l’avion ne ripe plus sur la roche (le coefficient de marée haute ne s’est élevé que de 10cm).

 

Dimanche 4 juillet 1937

Le jour suivant, les vivres commencent à manquer et ils n’ont plus d’eau. Le temps s’est remis au beau et la température monte. Ils quittent l’avion sans problème la marée basse est à 10h mais l’avion est au sec bien avant 10h.

Amelia a repéré une mare d’eau à la pointe Sud-Est, aussi prend-elle un petit container, un morceau de tôle, la bouteille de Bénédictine, des flacons, des allumettes et une boite de sextant pour ne pas briser les flacons. Elle laisse Fred Noonan au même endroit en bordure de plage près de l'avion. Elle se rend à la pointe Sud-Est allume un feu et fait bouillir de l’eau. Cette eau est sans doute fort saumâtre mais c’est tout ce qu’elle a trouvé. Peut-être arrive-t-elle à récupérer un peu de vapeur d’eau en utilisant plusieurs récipients (*).

(*) Depuis l’antiquité les marins savent désaliniser l’eau de mer. Alexandre le Grand rapporte que, sur les bateaux phéniciens, les marins faisaient bouillir de l’eau de mer et récupéraient la vapeur d’eau avec des éponges…

On peut supposer qu’Amelia fasse bouillir de l’eau saumâtre dans le container qu’elle a pris dans l’avion, qu’elle ferme ce container avec une tôle après avoir suspendu divers flacons sous la tôle… la vapeur d’eau se condense alors dans ces flacons, ce qui lui permet de récupérer un peu d’eau potable. Mais elle n’a rien de bien adapté et ne récupère que de toutes petites quantités ??.

https://www.youtube.com/watch?v=wRSAEZQKVf4

Néanmoins si Amelia avait pu distiller de l'eau salée elle n'aurait pas eu besoin de se rendre à l'autre bout de l'île. A noter que dans les manuels de survie de l'époque on ne parlait pas des techniques pour désaliniser l'eau de mer :

https://digirepo.nlm.nih.gov/ext/dw/13820890R/PDF/13820890R.pdf  (voir page 32)

Ensuite elle trouve quelque nourriture, fruits, noix de coco ? (*), crustacés, oisillons et petites tortues. Elle se fait à manger et elle prépare un petit repas pour Fred qu’elle lui apportera avec la boite du sextant et de l’eau bouillie dans la bouteille de Bénédictine.

(*) Cet atoll n'était plus habité depuis 1880 et, comme l'indique l'officier anglais Gérald Gallagher chargé de la recolonisation de l'île en 1940, il n'y avait que quelques cocotiers enfouis dans la végétation, et il n'est pas sûr qu'Amelia ait pu s'approvisionner en noix de coco. Dommage le lait de coco aurait pu étancher sa soif... Ensuite, à partir de 1940, Gallagher a organisé des plantations de cocotiers en vue de produire du copra, et depuis l'atoll de Nikumaroro regorge de noix de coco.

En revanche il est semble-t-il très facile d'attrapper des oiseaux de mer car certains nichent au sol, comme les phaétons :

phaéton à bec jaune "paille-en-queue" Kiribati Pacifique Sud

Sans doute ses opérations pour bouillir de l’eau saumâtre et récupérer de l’eau plus ou moins potable, lui prennent pas mal de temps, et sans doute a-t-elle un deuxième foyer proche de l’endroit où Fred se repose, de façon à ne pas l’abandonner trop longtemps.

En fin de ce dimanche après-midi ils remontent dans l’avion pour passer des messages et pour dormir. La mer est un peu plus agitée (le coefficient de marée a encore augmenté, (+70 et -70cm) mais l’amarrage de l’avion tient bon. A noter qu’à la marée haute de 16h le coefficient n’est que de 60, ce n’est donc pas encore très inquiétant.

 

Lundi 5 juillet 1937

Le lundi, la journée se passe de la même façon, pendant la nuit le coefficient de la marée s’est encore élevé de 5cm, +75 à 4h 30 du matin, mais ils dormaient ou somnolaient et il ne s’est rien passé. A la marée haute de 16h30 le coefficient est redescendu à +70. Donc le soir ils reviennent à l’avion sans trop se méfier. A noter que les 2 marées basses ont atteint ou même dépassé les -80, mais cela est sans doute passé inaperçu.

Il est possible qu’Amelia n’ait pas toute sa lucidité, il lui faut marcher (en boitant) presque 6km pour aller à la pointe SE (et autant pour en revenir) et faire du feu et récupérer de l’eau pour elle et pour Noonan. Il faut aussi qu'elle circule pour ramasser du combustible, feuilles sèches, bois mort... et il faut qu’elle trouve de quoi manger pour 2 personnes. Donc beaucoup d’efforts dans une chaleur équatoriale qui la déshydrate.

Près des vestiges des anciennes habitations (l'île était habitée jusqu'en 1880) il y avait peut-être un ancien puits plus proche que l'eau de la pointe Sud-Est... mais la végétation était très dense, avec sans doute plus de moustiques qu'en bord de mer, et Amelia n'a pas eu le loisir ou l'énergie de fouiller tous les recoins de l'atoll.

Je suis certain qu'ils passaient les nuits dans l'Electra, d'autant que les marées le leur permettaient d'accéder facilement à l'avion le soir et de revenir le matin sur la plage, et c'était plus confortable, ils étaient protégés des moustiques et il y avait même des toilettes à l'arrière. Et on n'a retrouvé sur l'atoll que très peu de choses leur appartenant, ni leurs habits, ni leurs bagages, ni les matériels de navigation, ni les outils... etc. Tout porte à croire qu'ils n'ont pas envisagé que l'avion allait être emporté par la mer.

 

Mardi 6 juillet 1937

à 5h du matin, 2h avant le lever du jour, la marée haute s’élève à +85.

Je suppose qu’un fort courant se produit le long de la plage. Avec cette amplitude de marée le lagon aspire 10 millions de m3 d’eau pour se remplir, et la direction du vent peut faire varier la trajectoire du courant. La queue de l’avion est sans doute moins bien amarrée que les roues, le point d’ancrage cède, l’avion pivote, le deuxième train (déjà endommagé lors de l’atterrissage) se brise, et l’avion part au fil de l’eau, il flotte un moment, mais il va vite se remplir d’eau et s'enfoncer car il s’est éloigné de la plage et que le bas de sa carlingue est endommagé et n'est plus étanche.

Amelia Earhart sur les réservoirs supplémentaires de son avion Lockheed Electra

Amelia, sur les réservoirs supplémentaires, ses jambes encore dans le cockpit…

Amelia rampe sur les réservoirs pour rejoindre la cabine arrière et tenter de sortir Fred de l’avion, mais elle ne parvient pas à ouvrir la porte arrière à cause du niveau d’eau (marée haute et 2ème train cassé). C’est la panique, elle est dans l’obscurité complète, Fred se débat, rendant impossible son sauvetage, l'eau monte et finalement elle renoncera et sortira seule après avoir difficilement regagné le poste de pilotage pour ouvrir la trappe supérieure du cockpit, et s'échapper par le haut, sans avoir le temps de ne rien emporter ou presque. (*)

(*) On peut penser que l’avion a été secoué avant de se décrocher du platier, et qu’Amelia a eu le temps de s'habiller... mais ensuite avec l'eau qui monte dans l'avion et l'obscurité elle ne peut pas emporter grand chose.

Au matin du mercredi 7 juillet 1937, Amelia se retrouve en grande difficulté, tout est resté dans l’avion (ou presque), notamment ses cachets pour la dysenterie. Elle revient péniblement à son campement de jour, désespérée et de plus en plus malade et affaiblie. Il lui reste ses récipients, la bouteille de bénédictine, la boite de sextant, les flacons mais elle n’a plus ses allumettes pour faire du feu.

J’ajouterai qu’elle n’a ni ses allumettes ni ses « Lucky Strike » !

Amelia est sans doute décédée avant le passage des hydravions de Lambrecht, donc entre le mardi 6 juillet et le matin du vendredi 9 juillet 1937 (*).

Amelia est malade avant son arrivée à Nikumaroro, et dans ses derniers messages elle signale qu’elle n’a plus d’eau et qu'elle et Noonan ne pourront plus tenir très longtemps. Après la perte de l’avion elle n’a plus d’abri pour se protéger des moustiques et si elle continue à boire de l’eau saumâtre elle va rapidement avoir de gros problèmes qui vont encore aggraver son état, surtout si elle n’a plus de quoi faire du feu et ne peut même plus désinfecter cette eau saumâtre…

On pourrait penser à un accident comme une morsure de petit requin de lagon, ou une piqûre de poisson pierre ou de cône textile, (petit coquillage qui sort un dard quand on le qu'on le prend dans la main et qui est aussi mortel que le poisson pierre...), mais la cause la plus probable, c'est le manque d'eau potable, surtout qu'elle est déjà déhydratée, par une dysenterie. Elle fait le tour du monde en suivant la ligne équatoriale et cela fait un moment qu'elle évolue dans des pays avec des risques sanitaires : que ce soit une dysenterie tropicale (shigellose) ou une dengue, ces maladies donnent une forte fièvre et provoquent une déhydratation sévère pouvant entraîner un blocage des reins ou une occlusion intestinale, tout particulièrement si on n'a pas d'eau et pas de soins médicaux.

En 1940 quand l'île est repeuplée par les anglais avec des habitants des îles voisines, ils laissent sur place l'officier Gérald Gallagher, chef de la recolonisation, qui construit un village et qui s'occupe en priorité du problème de l'eau potable. Quand ce dernier retrouve le squelette d'Amelia, il est sûr que c'est elle, et il est sûr qu'elle est morte de soif.

(*) C'est une mort rapide si on compare sa situation avec celle du célèbre aviateur Eddie Rickenbacker, as de la 1ère guerre mondiale, perdu en mer en octobre 1942, exactement dans cette même zone du Pacifique Sud. L'avion (B-17) qui le transportait n'a pas trouvé l'île de Canton, (Abariringa), autre île du même archipel, (les îles Phoenix), sur laquelle il devait se poser et a dû amerrir, faute de carburant, en plein océan. Amerrissage difficile dans une mer agitée, l'avion a coulé rapidement. L'équipage et les passagers, dont Eddie, âgé de 52 ans, ont pu gonflé 3 radeaux pneumatiques mais ils n'avaient ni eau, ni vivres… et ils ont quand même survécu 24 jours !

Voir le PDF, (un récit terrifiant).

Dans ce groupe on notera la mort assez rapide du sergent-chef pilote Alexander Kaczmarczyk qui sortait juste d'un long séjour à l'hôpital, ce qui fait penser à la condition physique d'Amelia... Deux autres finissent dans le coma et échappent à la mort d'extrême justesse. Et tous ceux qui s'en sortent sont sauvés le huitième jour par l'exploit d'Eddie Rickenbacker qui attrappe miraculeusement une mouette : cet oiseau est aussitôt dévoré et ses tripes vont permettre de pêcher plusieurs poissons !

Eddie Rickenbacker as des as américain pendant la première guerre mondiale

Eddie Rickenbacker, l'as des as américains de la 1ère Guerre Mondiale

A noter qu’après cette mésaventure de Rickenbacker les américains équiperont leurs avions militaires d’un kit de désalinisation, à partir de fin 1942, comme les anglais l’avaient déjà fait depuis 1940.

 

En résumé une incroyable série noire :

- Le mari d’Amelia ne s’est occupé que de promotion commerciale et a négligé les équipements radio,

- A Lae, (Papouasie / Nouvelle Guinée), Amelia est atteinte d'une dysenterie tropicale qui l'oblige à décaler son départ et ensuite Amelia, pressée par l’Itaska qui l’attend en mer (avec ses 97 hommes d'équipage qui s'impatientent), se retrouve dans une mauvaise fenêtre météo, et dans un état de santé délicat,

- Noonan et Amelia ne connaissent pas le morse... Après le mauvais atterrissage à Honolulu, l'avion doit être réparé et le Tour du Monde prend 4 mois de retard. Harry Manning n'est plus disponible pour continuer l'aventure. Dommage ! C'est un marin chevronné, un bon pilote, un excellent navigateur et un opérateur radio expérimenté. Sa présence aurait été plus que souhaitable dans cette étape difficile, pour les communications radio mais aussi pour relayer une Amelia fatiguée,

Amelia Earhart, Harry Manning et Fred Noonan

- A l’approche de la guerre avec le Japon l’Itaska ne voulait utiliser que certaines fréquences,

- L’antenne ventrale s’arrache au décollage, sur la mauvaise piste de Lae, coupe toute communication et rend la fin du vol très compliquée, il devient quasi impossible de trouver l’île de Howland,

- Amelia arrive à Nikumaroro en début de marée montante ce qui l’incite à tenter de se poser sur le platier,

- Le train s’arrache à l’atterrissage et l’avion ne peut être mis à l’abri, juste avant la semaine des hautes eaux,

- La grave blessure de Noonan le rendra incapable d’aider Amelia, et il va même constituer un lourd handicap pour la survie d’Amelia,

- Amelia a une cheville foulée ce qui va réduire son activité,

- Un Catalina décolle de Pearl Harbor le 2 juillet 1937, le jour même, mais il doit rebrousser chemin à cause de la météo (au total 24h de vol !) : ce Catalina aurait pu se ravitailler à Howland et entamer des recherches plus précoces. Si cet avion extraordinaire, à grand rayon d'action, était arrivé le 3 juillet : il avait toutes les chances de retrouver Amelia dont il aurait entendu les messages en clair,

- Il ne pleut que juste après son arrivée sur l'atoll, à un moment où elle n'était pas encore consciente qu'elle pouvait manquer d'eau. Si la pluie était intervenue plus tard dans la semaine, elle aurait fait des provisions d'eau et peut-être que le Catalina l'aurait même retrouvée avant la pluie,

- Erreur dans le message reçu par Betty Klenck en Floride : Norwich City devient New York City, sans cette erreur les gardes côtes alertés par son père auraient peut-être identifié le bateau échoué...,

- Nikumaroro ne figurant pas sur la plupart des cartes marines, les recherches ne vont pas s'orienter rapidement vers cette île,

- La rechute de la dysenterie, et Amelia qui se prive d’eau pour soigner Noonan,

- L'Itaska s'acharne à rechercher Amelia vers le Nord, et le Nord Ouest alors qu'il n'y avait sur cette zone aucun endroit où elle pouvait se poser,

Le cuirassé USS Colorado et ses hydravions arrive de Pearl Harbour pour lancer les recherches vers le Sud

- Le lieutenant John O. Lambrecht, le chef d’escadrille des 3 hydravions du Colorado, n'arrive à Nikumaroro que le 9 janvier 1937, un peu avant 8h30, et prend une photo sur laquelle il est visible qu’il passe à marée haute, à marée basse il aurait vu, lui ou un de ses pilotes, le train d’atterrissage planté dans le platier et probablement l'avion ou quelques débris de l’avion. A noter que sur la photo de Lambrecht, la marée semble particulièrement haute : la marée haute est à 7h ce jour là, donc à 8h 30 on est encore à marée haute, le platier est recouvert par la mer, et l'atoll ressemble à un mince cordon. Dans cette affaire la marée est toujours à l’inverse de ce qu'il serait souhaitable et toujours défavorable à la survie de Fred et d’Amelia…, photo de Lambrecht,

- Ce vendredi 9 juillet les hydravions de Lambrecht ne se posent pas car ils ne voient pas d’avion sur l’île, et ils ont peur d’abîmer les moteurs dans le nuage oiseaux au dessus du lagon, et peut-être Amélia était-elle encore vivante… Lambrecht note dans son rapport sur l’île Gardner : « Ici, les signes d'une habitation récente étaient clairement visibles (*), mais des tournées et des zooms répétés n'ont pas réussi à susciter la moindre réponse de la part des habitants éventuels, et il a finalement été considéré comme acquis qu'il n'y en avait pas »... il n’a pas réalisé qu’il ne pouvait pas y avoir d’habitation récente, autre que la présence d’Amelia. Il n’a pas réalisé non plus qu’Amelia pouvait être arrivée à marée basse, et avoir atterri sur le platier,

(*) Les « signes d’une habitation récente » sont certainement les endroits où Amelia a fait du feu. Là où elle fait bouillir de l’eau à la pointe Sud-Est et là où elle installe Noonan pendant la journée, et où elle le rejoint pour l’alimenter et lui donner de l’eau bouillie. A ces 2 endroits elle a amassé des branchages et quelques pierres autour des foyers qui sont probablement bien noirs et visibles du ciel par des avions qui font des « zooms » à basse altitude. Et il y a encore sur ces campements sommaires, la plaque de tôle, le container, des carapaces de tortue, des coquillages, des débris divers…etc.

réparation de la catapulte - hydravion Vought O3U-3 Corsair

- La recherche avec les hydravions du Colorado n’a pas été optimale. Le Colorado a un problème technique avec sa catapulte pour lancer ses avions. Seuls 2 avions sur 3 sont lancés durant le premier jour de recherche (sur 4 jours au total),

- Lambrecht ne dispose pas d’information précise sur les îles à visiter, et pendant les 2 premiers jours les avions cherchent un « récif » qui n’existe pas,

  → Voir : https://tighar.org/Projects/Earhart/Archives/Documents/Lambrecht's_Report.html

- Lambrecht a bien axé sa recherche sur l’axe Nord/Sud indiqué par Amelia, il visite Baker, puis Mc Kean, puis Gardner (Nikumaroro), puis le récif de Carondelet plus au Sud…, mais les messages post disparition ne semblent pas lui avoir été transmis, ni aucune information sur la blessure de Noonan et la difficulté de survie sur des atolls sans eau potable (*).

(*) Les anglais connaissent ces îles. Lors de la reconnaissance d’octobre 1937 préalable à la recolonisation de l’île de Gardner (Nikumaroro), ils arrivent avec des provisions d’eau potable et du matériel pour creuser des puits. A leur passage suivant ils ont même des machines à dessaler de l’eau de mer. Lambrecht n’a pas conscience du caractère d’urgence dû au manque d’eau, et enfin il agit à l’inverse de la logique : le troisième jour, vendredi 9 juillet 1937, il ne se pose pas sur les îles inhabitées de Mc Kean et de Gardner, alors qu’il s’arrête longuement sur l’île habitée de Hull (Orona) où Amelia aurait trouvé de l’eau, des vivres et des soins. Et s’il avait interrogé le colon anglais qui dirigeait Hull, à propos des « signes d’habitation » sur l’île de Gardner il serait sans doute revenu en arrière et il était peut-être encore temps de sauver Amelia. Gardner et Hull ne sont distants que de 260 km et le Colorado était à ce moment à mi-chemin entre Gardner (Nikumaroro) et Hull (Orona).

Après la mort d’Amelia on perd encore du temps :

- La guerre interdit de nouvelles recherches,

- Les autorités anglaises sont « septiques », égarent le squelette, et enterrent (*) la découverte de Gallagher,

(*) sans doute craignent-ils de voir arriver trop d’américains alors qu’ils entendent conserver cet archipel sous contrôle anglais et qu’ils font justement des efforts pour recoloniser les îles Gilbert.

  En 1940, 3 ans après la disparition d'Amelia Earhart, l'officier anglais Gerald Gallagher est envoyé sur l'île de Gardner (Nikumaroro) pour en diriger la recolonisation. Quelques temps après son arrivée, il retrouve un squelette au pied d'un arbre avec les traces d'un campement, une boite pour sextant et une bouteille de Bénédictine. Il est sûr d'avoir retrouvé les restes d'Amelia Earhart et il envoie de nombreux messages aux autorités anglaises à ce sujet..., et il envoie aussi les ossements et les objets retrouvés à côté du squelette. Mais du côté du commandement on ne partage pas son enthousiasme, les ossements seront "perdus", il meurt sur l'île avant la fin de la guerre, et sa découverte sera enterrée jusqu'en 1998.

- Pendant la guerre, Julius Wile, l’importateur d’alcool, a été envoyé sur le front européen et personne ne l’informe que sa bouteille de Bénédictine a été retrouvée près d’ossements qui pouvaient être ceux d’Amelia.